j’ai envie de vous raconter une histoire gaie

c’est « rencontre d’un autre type » ou « il humait le vent »

Appuyé à la porte de la cuisine, il humait le vent qui s’amusait dans le jardin. Il s’était annoncé la veille :

« - je viens travailler du côté de chez vous…

- venez donc déjeuner à la maison »

et il était simplement venu. Quand il était arrivé, elle, dans sa tête, courait autour de lui en sautant, comme une petite fille, toute à sa joie de le revoir.

Quel événement incroyable : « Bienveillant est là ! Il est venu ! ». Depuis la veille, elle s’était efforcée d’imaginer ce que pourrait être cette rencontre, impromptue, surprise, d’un nouveau genre, d’un autre type. Elle avait pensé courir vers lui, les bras ouverts mais non, décidément, elle n’est plus une petite fille et il n’est pas son père. Elle avait pensé l’enlacer et l’embrasser passionnément, mais non, ils ne sont pas amants. Son frère ? non pas son frère non plus. Et elle n’avait pas trouvé. Il n’y avait pas de modèle pour se revoir. Même dans les films, elle n’avait jamais vu de relations qui ressemblent à ce qui se passait entre eux. Alors, elle s’était dit : « on verra bien » et elle était prête à l’accueillir.

Elle était allée le cueillir au sortir de sa voiture, lui s’inquiétant d’être correctement stationné, elle, dans sa tête, courant autour de lui. Une étreinte chaleureuse, les regards qui se croisent, un baiser sur la joue, plutôt une caresse de sa peau contre la sienne, le sourire qui éclate et rayonne.

Elle avait faim, lui aussi. On est passés à table. La jeune fille de la maison avait disposé trois couverts de la vaisselle qu’on utilisait chaque jour, sur la table dans la cuisine. Un peu de vin blanc pour accompagner les St Jacques. Quelques boules de glace. Repas léger mais goûteux, comme elle aime les concocter pour les gens qu’elle aime. Café au salon.

Il a une histoire à raconter. Assis dans un fauteuil, il déguste son café et capte l’ambiance de la pièce : rideaux orange, statuettes à motifs africains, vieux meubles élégants et vaisselle fine, lumière du jour, mordorée par les rideaux, paysage immense de la petite Beauce par la fenêtre, les chemins, les cultures qui ondoient sous le vent, celui-là même qui murmure dans la toiture et le jardin. Elle, elle s’assoit dans un fauteuil, pose ses jambes sur un pouf, à demi tournée vers le dehors. Puis elle pivote vers lui, toute ouïe, écoutant intensément son histoire. Y mêlant son grain de sel parfois, y ajoutant ce qu’elle en avait pensé à un moment. L’histoire, structurée, mêle le rêve et les réalités, le concret et les aspirations, dépeint des étapes dans la vie. Tout à coup, elle a reconnu l’étape, l’étape du Capricorne, celle des réalisations. Et tout à coup, tous les évènements des derniers mois ont pris une signification particulière, comme s’ils avaient été peints au Capricorne, colorés par ce signe, revêtus de son odeur. Oui, oui ! elle était en train de REALISER ce à quoi sa nature profonde la portait. C’était une si belle histoire, qui la menait vers la sagesse et la paix, loin des renoncements auxquels elle avait cru devoir se soumettre, loin de la souffrance qui l’avait accompagnée pendant si longtemps… L’âge des réalisations, pas l’âge de raison, pas le 3ème âge ; un nouveau et étonnant chemin à parcourir, totalement inconnu mais si merveilleusement attirant. Et il l’accompagnerait ; pour qu’elle n’ait pas peur et parce que c’est aussi son chemin à lui.

L’histoire finie, le temps passant, il avait bien fallu quand même penser à travailler. Ils travaillèrent environ une heure puis revinrent dans le salon. Elle lui montra sa peinture, puis celle de Titouan Lamazou, qu’elle adore. Puis il fut l’heure de partir. Il avait des obligations le soir, il devait faire une route un peu longue. Elle l’accompagna. Juchée sur la marche de l’entrée, elle l’embrassa et se sera contre lui, brièvement, les visages à la même hauteur. Regards qui se perdent, bras qui se défont… « Au revoir. Rentrez bien. A bientôt, c’était formidable de vous revoir… »

Dans sa tête à elle, la petite fille ne courait plus autour de lui. La joie l’habitait toute entière ; il avait allumé le soleil de son cœur, le bonheur. Il lui avait donné du bonheur. C’était plus que tout ce qu’elle avait eu jusque là, plus qu’un amant, plus qu’un amour ; c’était un amour hors du commun, une rencontre entre leurs âmes ; quelque chose de si intime et secret qu’elle ne pouvait pas en parler à d’autres, forcément les autres n’y comprendraient rien. Cela ne rentre pas dans les cases des conventions sociales ordinaires, cela ne rentrait dans aucun moule. Elle ne ressentait aucun regret, aucune tristesse, seulement une immense reconnaissance envers cet homme, une si grande joie d’avoir partagé avec lui quelques heures intenses et chaleureuses, oranges…

Maintenant, elle hume le vent qui s’amuse dans le jardin à lui faire croire que la vie est légère…

 

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6 réponses à j’ai envie de vous raconter une histoire gaie

  1. mariejo dit :

    Formidable que tu aies publié ça… Va falloir qu’on se trouve un auditoire parce que là, on est un peu seules! D’ailleurs, voici ce qu’Imran m’envoie aujourd’hui : Marie-Jo
    … inner beauty is really a clear reflection of yourself. Grace is a beautiful thing and you carry it well.
    Bruce
    J’avais oublié.

  2. DUBREUIL MARIE dit :

    La beauté intérieure est vraiment une réflexion(un reflet) claire de vous. La grâce est une belle chose et vous le portez bien (traduit à la machine par reverso) ! Ouais, il faut continuer à y penser !

  3. mariejo dit :

    Comme quoi il ne faut pas faire confiance aux machines qui ne nous remplaceront jamais. Mais bon, c’est pas si mal. Donne-moi un peu de temps et je vais faire une bonne traduction…

  4. Anne-Pascale dit :

    C’est le cours d’anglais de Marie-Jo qui t’a permis de traduire la phrase en anglais, Minelle ?

  5. mariejo dit :

    Oui, exactement… Aragon avait très raison, c’est ma vieille amie Éliane qui le disait toujours, et moi, je répète, mais je ne radote pas encore.

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